1 △ QUI ETIEZ-VOUS AVANT D'ARRIVER A OJAI?
Septemnre 2004. Vingtième jour en France. Dixième jour de classe.
Le soleil dardait ses rayons sur le bras nu du jeune canadien assis au fond de la classe, plongé dans la contemplation du paysage qui se dessinait derrière la fenêtre. Son regard balayait la plaine, les collines et se perdait sur la ligne d'horizon. Quelques kilomètres plus loin, la mer ; invisible à ses yeux, mais bien présente dans son coeur.
Il adorait la mer. Sentir les embruns contre sa peau, courir sur les plages, nager contre les rouleaux, pourchasser les poissons, et passer de longues heures assis sur le sable avec sa guitare, à composer des morceaux et fredonner des mélodies sorties tout droit de son esprit qui tourbillonnait joyeusement au rythme des vagues s'écrasant sur les rochers.
Absorbé par ses réflexions, il n'entendit pas la question que lui posait son professeur. "Anke !" répéta donc celui-ci en haussant le ton. L'intéressé le fixa d'un air insolent, un drôle de sourire sur les lèvres. Le vieil homme soupira et leva les yeux au ciel. Il l'exaspérait, ce gosse. 16 ans et déjà d'une assurance à tenir tête à des montagnes. Jeune, un peu dingue mais surtout talentueux. Un vrai artiste. Un musicien. Quelqu'un en marge, quoi.
"Alors le gay, encore en train de composer tes musiques de tapette ?"
Anke se retourna d'un bond, comme foudroyé. Ses yeux pétillaient de rage et il serrait les poings à en faire blanchir ses phalanges. L'éléctricité entre les deux jeunes était désormais palpable. Le provocateur, un jeune coréen au sourire provocateur, se contentait de fixer son adversaire, ravi de la réaction de colère qu'il avait provoquée.
Mais Anke n'était pas fou, et il était seul. Il se leva d'un bond et quitta la classe sans un regard en arrière.
"Le gay". Ce nom le suivait pourtant, collant à lui comme une ombre. Dans la rue, on le regardait passer en riant et lui crachait au visage, puis on lui arrachait sa guitare après avoir froissé ses partitions.
Et il les regardait saboter son travail, détruire sa vie, avant de s'éloigner tête basse sous un flot d'insultes, embarquant avec lui sa rage et sa peine.
Assis sur la rembarde d'un pont, il regardait au loin, les vestiges de sa guitare serrés contre lui. Il rêvait à la mer, et à des jours meilleurs, fixant l'horizon de ses yeux mouillés de larmes.
Le jeune canadien, beau et insolent, n'était plus que l'ombre de lui même, une silhouette sombre déambulant dans les rues de la ville une fois la nuit tombée, ses bouteilles de bierre à la main.
Ils l'avaient fait sombrer et sa vie était partie en fumée, noyée à la manière de ses partitions abandonnées sur la grande route un jour de déluge.

2 △ COMMENT ÊTES-VOUS ARRIVÉ A OJAI?
Une ombre humaine glissait le long des murs. Une fois de plus. Comme toutes les nuits depuis bientôt 6 ans. 6 longues années d'errance, à jouer les noctambules pour passer inaperçu. Les rares personnes qui fréquentaient les rues de la ville à ces heures-ci ne lui posaient guère de problème. Après l'avoir regardé passer avec curiosité pendant quelques semaines, il ne lui accordaient pas plus d'attention qu'un simple élément du paysage.
Anke s'appuya contre un mur et porta une de ses bouteilles à la bouche. Vide. Il grogna et l'envoya balader contre un mur de la rue d'en face. L'une après l'autre, toutes celles qu'il avait en main se retrouvèrent brisées en mille morceaux sur le trottoir d'en face. Le jour se levait déjà. Il fallait partir.
Le canadien grimpa dans son vieux pick-up et la portière se referma en grinçant. Le moteur s'alluma, et il disparut à toute allure, laissant comme seule trace de son passage une épaisse nappe de fumée.
Il avait continué tout droit, ratant certainement la sortie. Les effets de l'alcool se faisaient sentir et il conduisait sans vraiment savoir où il allait. Les panneaux indiquant la direction de sa ville s'espacèrent peu à peu. Il savait qu'il était perdu, mais l'idée ne lui venait pas de faire demi-tour. Dans un état de semi-conscience, il se dirigeait à toute allure vers son rêve : s'enfuir.

3 △ COMMENT RÉSUMERIEZ-VOUS VOTRE VIE MAINTENANT ?
Tu ne m’impressionnes pas tu sais. Sous tes grands airs de j’ai tout vu, tout connu, rien ne m’atteint... Je pense que tu meurs de trouille. Je pense que tu vaux beaucoup mieux que ce que tu veux montrer.
Heureux ? J'en doute. Simplement ... plus heureux qu'avant. Et pas totalement vengé. Fini le noctambule, le drogué au volant, finies les envies suicidaires. La seule chose n'ayant pas changé chez lui, c'est son talent et son profond amour pour sa guitare. Acerbe, cynique, frondeur et manipulateur, il se venge consciemment de tout ce qu'on lui a fait endurer. On pourrait même le qualifier de ... vaniteux. Sans arme à la main, il se pense capable d'anéantir plus d'un homme et il n'hésite pas à le faire savoir par sa façon de fixer les gens avec son léger sourire de dédain qu'on pourrait citer comme une de ses caractéristiques principales. Mais il continue de vivre dans l'ombre et n'hésite pas à provoquer de potentiels adversaires, même si ceux-ci sont en mesure de l'abattre d'une seconde à l'autre. Le jeune écervelé qu'il avait toujours été, en somme. A une différence : il n'a plus peur. Plus peur de rien, ni de devenir fou - sans doute l'est-il déjà - ni de mourir, puisque sa musique ne valait plus rien. Et même dans les moments où il croyait en une bonne composition, il entendait résonner les ratés de sa vie dans chacune de ses notes.

hors jeu

↝ prénom(s) Marine ↝ pseudo Graff ↝ âge 15 ↝ où avez-vous connu le forum Par Chin Lee :) ↝ fréquence de connexion par semaine Entre 3/7 et 6/7 en période scolaire ↝ commentaire ? questions ? Concept extra, design agréable, les gens m'ont l'air bien sympathiques, bref, j'adore ^^